« La colline des potences » : mi-ange mi-démon

22 janvier 2021


Photo : SensCritique

En 1957, Delmer Daves réalise ce fascinant film où le manichéisme habituel des westerns traditionnels est totalement absent. Entièrement construit sur la nuance des sentiments, La colline des potences n’en demeure pas moins un film dur et complexe.
Dès le premier plan, dans un long travelling magnifiant le paysage, le docteur Joe Frail (Gary Cooper), avance sur son cheval pour s’installer dans une communauté de chercheurs d’or. Son attitude hiératique, sobre et retenue semble un moment déstabilisée. Un infime rictus se dessine sur son visage à la vue d’une corde accrochée à une branche d’arbre (l’arbre des pendus).
Arrivé au village, il ouvre son cabinet médical au dessus d’une colline dominant le petite cité minière en pleine effervescence. La caméra filme le village en une superbe plongée comme prise au piège de l’oeil impérieux de Joe Frail. Il sauve Rune (Ben Piazza), un jeune homme blessé accusé de vol qu’il garde à son service. Il soigne avec tendresse la jeune Elizabeth (Maria Schell) blessée dans une attaque de diligence, devenue aveugle et l’aide à recouvrer la vue. Elle s’éprend de lui, mais il la rejette, marqué semble-t-il par une blessure amoureuse passée. Les soins sincères qu’il prodigue aux uns et aux autres, masquent néanmoins un personnage tyrannique et violent, ne supportant aucune intrusion dans ses affaires personnelles. Il tuera sans état d’âme, le prospecteur Frenchy (fantastique Karl Malden), après l’avoir surpris tentant de violer Elizabeth.
Tous les protagonistes sont ambivalents et complexes. Pas de manichéisme ni chez Joe Frail, ni chez Frenchy, louche et naïf en même temps, ni même chez Elizabeth, attirée par l’argent. Elle n’hésite pas à s’associer avec Frenchy pour exploiter une concession financée en secret par Joe Frail.
Delmer Daves décrit l’exploitation minière avec un réalisme proche du documentaire. C’est là, au cours d’un orage que nos prospecteurs vont découvrir un filon inimaginable. Le film prend alors une tournure de «féérie répugnante» : Frenchy est acclamé, les pépites sont distribuées à foison, l’alcool coule à flots, des bagarres éclatent, on met le feu à tout le village, des prédicateurs de tout poil s’agitent. L’un d’entre eux (George C. Scott), illuminé, adepte des soins par imposition des mains et haïssant évidemment Joe, soulève la population contre lui. Ils ne vont pas tarder à lyncher Joe et l’emmener à l’arbre des pendus. Elizabeth arrivera à temps pour le sauver en suppliant la population d’accepter les titres de propriété de son exploitation. Cette longue et intense supplique se lit dans les yeux d’un bleu profond de Maria Schell. L’attrait de l’argent fera le reste. Dans un magnifique plan séquence final, Joe s’humanise enfin et accepte l’amour d’Elizabeth. Un film baroque et lyrique.

La colline des potences
Delmer Daves
USA – 1957
Avec Fary Cooper, Maria Schell, Karl Malden, George C. Scott, Ben Piazza
Disponible en DVD et Blu-ray

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